- Des chercheurs de l’Université de Grenade ont évalué l’impact de ces photographies chez les gens moyennant une enquête et la réalisation d’épreuves physiologiques avec un polygraphe.
- Quelques-unes parmi ces images non seulement ne sont pas perçues comme négatives par les gens, mais sont même positives, raison pour laquelle elles pourraient provoquer un effet contraire : un rapprochement au stimulus, c’est-à-dire au tabac.
Les images préventives que Bruxelles propose pour les paquets de tabac afin de réduire leur consommation ne présentent pas l’impact souhaité chez les fumeurs, car seulement certaines parmi elles leur semblent réellement désagréables. Par conséquent, si la Commission Européenne veut améliorer l’efficacité de ses campagnes anti-tabagiques, elle devrait produire une nouvelle série d’images plus fracassantes au niveau émotionnel.
Ce sont quelques-unes parmi les conclusions d’une recherche, réalisée au Département de Personnalité, d’Évaluation et de Traitement Psychologique de l’Université de Grenade par les professeurs Miguel Ángel Muñoz, Luis Ciria et Jaime Vila Castelar, dans laquelle on a évalué l’impact émotionnel chez les gens des images préventives des paquets de tabac proposées par la Commission Européenne.
Les scientifiques de l’Université de Grenade ont réalisé deux études complémentaires sur le même sujet. La première d’entre elles, publiée par la revue Tobacco Control, regroupe l’opinion subjective de 597 participants distribués en six groupes en fonction de l’âge : 13-14, 15-16, 17-18, 19-20, 21-22 et à partir de 23 ans, à qui on a présenté une batterie de 35 images préventives proposées par la Commission Européenne (Décision 2003/641/CE du 5 septembre 2003).
Mesure de l’impact moyennant des épreuves physiologiques
Dans la seconde étude, présentée récemment lors du « I Congrès Ibérique de Psychologie Clinique de la Santé et du Sport », les chercheurs ont mesuré moyennant des épreuves physiologiques, c’est-à-dire objectives, l’effectivité de ces images. On a ainsi analysé, à partir d’un échantillon composé de 50 sujets entre 19 et 23 ans, des variables comme la transpiration, le mouvement du muscle zygomatique (qui provoque le sourire) ou du muscle contractif (situé entre les sourcils).
Ils ont également étudié le mouvement de tête du sujet face à la vision de ces images : « Quand celui-ci se produit vers l’arrière, cela signifie qu’il y a une attitude de rejet, c’est-à-dire que la personne repousse l’image désagréable », signale le chercheur principal, Miguel Ángel Muñoz. Si la tête se déplace vers l’avant, cela veut dire que nous percevons l’image comme quelque chose d’agréable. La mesure de tous ces mouvements se réalise avec un polygraphe, un appareil capable de détecter de petites tensions corporelles.
Les résultats de cette seconde étude corroborent ceux obtenus dans la première : les images anti-tabac proposées par Bruxelles ne sont pas suffisamment fracassantes pour provoquer une réaction de rejet qui mène le sujet à s’éloigner du stimulus (dans ce cas, le paquet de tabac). « La plupart des photos sont perçues comme désagréables, mais n’ont pas l’impact suffisant chez le sujet », souligne M. Muñoz.
Qui plus est, certaines parmi ces images non seulement ne sont pas perçues comme négatives par les gens, « mais sont même positives, raison pour laquelle elles pourraient provoquer un effet contraire : un rapprochement au stimulus, c’est-à-dire au tabac. » C’est le cas d’une photographie sur laquelle apparaissent les mains entrelacées d’une vieille dame, et de celle où on voit l’échographie d’un fœtus.
Photos moins explicites
Le professeur Miguel Ángel Muñoz affirme qu’une possible solution à ce problème, qui s’applique déjà dans certains pays de l’UE, « serait d’inclure sur les paquets de tabac des photos moins explicites, ou qui n’aient même rien à voir avec la tabagie, mais soient en rapport avec les sensations que nous voulons provoquer chez les gens. » Ainsi, « si nous cherchons à transmettre une sensation d’étouffement, nous pouvons illustrer cette idée avec une personne avec la tête dans un sac, et si nous voulons provoquer du dégoût, nous pouvons inclure une photo d’insectes, par exemple. »
En vue des résultats de ces deux études, les chercheurs de l’Université de Grenade proposent de « réviser les images préventives en rapport avec le tabac proposées par la Commission Européenne, car elles n’ont pas l’impact désiré sur la population et, de plus, elles furent approuvées en 2003, de sorte que les gens s’y sont habitués, ce qui contribue également à la réduction de leur impact », conclut le chercheur de l’Université de Grenade.
Images adjointes :
Une des images anti-tabac supposément négatives proposées par la Commission Européenne, que les participants perçurent comme « agréable ».
Les chercheurs de l’Université de Grenade posent devant le nouveau Centre Esprit, Cerveau et Comportement, dont ils sont membres.
Contact : Miguel Ángel Muñoz. Département de Personnalité, d’Évaluation et de Traitement Psychologique de l’Université de Grenade. Tél. : 958 243753 ; courriel : mamuoz@ugr.es