- Des scientifiques espagnols et américains proposent un nouveau critère d’identification d’agents transmetteurs de maladies dans un article publié dans la prestigieuse revue PNAS.
- Leur travail pourrait être une importante trouvaille pour prédire quelles espèces animales ont plus de probabilités de produire de futures pandémies.
Des scientifiques espagnols et américains sont arrivés à identifier les espèces animales pouvant transmettre aux êtres humains le plus grand nombre de maladies, en utilisant pour cela des instruments mathématiques similaires à ceux qui s’emploient dans les études sur les réseaux sociaux, comme Facebook ou Twitter. Leur travail, publié cette semaine dans le dernier numéro de la prestigieuse revue PNAS, décrit comment réagissent les primates face à leurs parasites qui transmettent aux êtres humains des maladies comme la malaria, la fièvre jaune ou le sida, et pourrait être une importante trouvaille pour prédire quelles espèces animales ont plus de possibilités d’être à l’origine de futures pandémies.
José María Gómez, professeur du Département d’Écologie de l’Université de Grenade est l’auteur principal de cette recherche à laquelle ont également participé Charles L. Nunn, de l’Université de Cambridge (Massachussets, États-Unis) et Miguel Verdú, du Centre de Recherches sur la Désertisation de Valence (CSIC). Leur travail propose un critère d’identification d’agents transmetteurs de maladies basé sur des métriques de réseaux complexes similaires à celles utilisées dans l’étude des réseaux sociaux.
Tel que l’explique M. Gómez, « la plupart des maladies émergentes chez les êtres humains sont zoonotiques, c’est-à-dire qu’elles sont transmises par des animaux. Il est vital pour le développement de campagnes de contrôle et de vigilance desdites maladies d’identifier suffisamment à l’avance ces espèces animales présentant un risque élevé de transmission de maladies émergentes. »
Étude avec 150 espèces de primates
Pour mener à bien cette étude, les scientifiques ont créé un réseau dans lequel chaque nodule correspondait à une parmi les approximativement 150 espèces de primates non humains dont la faune parasitaire est suffisamment connue. « Chaque espèce de primate connecte avec les autres primates en fonction du nombre de parasites qu’ils partagent. Une fois créé, nous avons examiné la position, centrale ou périphérique, de chaque primate dans ce réseau. Un primate est central lorsqu’il connecte de façon intensive avec beaucoup d’autres primates que, à leur tour, sont très connectés entre eux », signale le chercheur de l’Université de Grenade.
D’après l’article publié par PNAS, les chercheurs ont découvert que les primates les plus centraux auraient une capacité majeure de transmettre des parasites à d’autres espèces, et de là aux êtres humains. « Cette idée est analogue aux sites web qui, par le fait d’être centraux et liés à beaucoup d’autres sites, distribuent leur information aux confins du réseau », remarque José María Gómez.
Les chercheurs ont confirmé leur hypothèse en mettant en rapport la valeur de centralité obtenue chez chaque primate et le nombre de pathogènes émergents partagés avec les êtres humains. Ils ont ainsi observé que les primates les plus centraux sont ceux qui partagent avec les êtres humains le plus grand nombre de pathogènes émergents.
En définitive, cette étude propose un critère simple afin de détecter de potentiels agents zoonotiques transmetteurs de maladies émergentes à des êtres humains : la centralité que ces agents maintiennent avec leurs parasites dans les réseaux d’interaction. « La seule information nécessaire pour créer ces réseaux est la diversité et le type de parasites logés chez chacun de ses hôtes, une information déjà disponible dans le cas de nombreux organismes zoonotiques. C’est la raison pour laquelle nous pensons que notre approche sera utile pour le développement de programmes de vigilance précoce des maladies émergentes chez les êtres humains », conclut M. Gómez.
Images adjointes
1.- Un exemplaire de Chlorocebus aethiops, une espèce de primate très susceptible de transmettre des maladies émergentes.
2.- Le diagramme montre comment les parasites se partagent parmi les primates. Chaque bulle représente une espèce de primate tandis que les lignes connectent des espèces qui partagent des parasites. À un plus grand diamètre de la bulle correspond un plus grand nombre de maladies infectieuses émergentes partagées avec les êtres humains. En bleu foncé, les dix espèces de primates qui partagent avec nous le plus grand nombre de pathogènes émergents.
Contact : José María Gómez Reyes. Département d’Écologie de l’Université de Grenade. Courriel : jmgreyes@ugr.es